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Que Dieu vous garde de l'homme silencieux quand il se met soudain à parler

Montréal, Intouchables, 242 pages.

 
  
 
 
 
 
Lettres québécoises : la revue de l'actualité littéraire, n° 98, été 2000, p. 31-32
 
Pèlerinages aux sources Où l'on retourne en arrière, l'on se trouve, l'on se perd
 
par Julie Sergent

DANS QUE DIEU VOUS GARDE DE L'HOMME silencieux quand il se met soudain à parler, le professeur et essayiste Victor Teboul raconte une histoire, qu'on ne se permettra pas d'appeler son histoire — le mot « roman » bien en évidence sur la couverture étant peut-être là pour quelque chose ! —, mais qui n'en a pas moins des airs de roman-témoignage, et, ce qui ne gâche rien, est fort divertissante.
 
Juif ou arabe ?
 
A preuve, imaginez que vous soyez né à Alexandrie, au début des années 1940, et que vous-même et vos parents possédiez un passeport français, legs de votre grand-père, né pour sa part en Tunisie, qui était alors un territoire français. Vous avez bien essayé d'avoir un passeport égyptien puisque vous êtes né en Egypte, mais les gratte-papier au pouvoir ont été catégoriques : vous êtes Français ! Bon, après tout, Il y a pire. Sauf qu'un jour, en 1956, le président Nasser a la bonne idée de nationaliser le canal de Suez, jusque-là britannique, déclenchant du coup un conflit au cours duquel les Anglais et les Français seront chassés d'Egypte. Évidemment, ça la fout mal. Mais vous avez du caractère. Et puisque vous êtes Français, vous débarquez donc, avec la famille, en France. Sauf que là, il y a un autre hic: la même année, la France reconnaît l'indépendance de 1a Tunisie. Par conséquent, votre passeport français ne vaut pas des clous. Désormais, ce qui vous catégorise le mieux, bien que vous n'ayez aucun papier à cet effet, c'est que vous êtes un juif arabe. Soit, mais les gens que vous rencontrez aimeraient bien que vous vous branchiez, quoi: juif ou arabe ?
 
On rit, mais c'est bien parce que Victor Teboul nous y invite, qui raconte son histoire avec une candeur telle qu'on le sent aussi étonné que nous de l'absurde de 1a situation dans laquelle est pris son héros, Maurice Ben Haïm, l'Égyptien qui ne parvenait pas à l'être.
 
Et le plus drôle n'est même pas encore arrivé.
 
Maurice, dans une ultime quête du papier d'identité officiel, tournant le dos à tant de pays plus proches et dont il parle la langue (il est allé à l'école en anglais, et parle aussi couramment, outre le français, le grec, l'arabe, l'italien, l'espagnol et l'hébreu), s'envolera pour le « plus meilleur pays du monde » que l'on sait, aboutissant donc avec ses parents, au début des années I960, rue Barclay, dans le quartier Côte-des-Neiges. On devine évidemment que l'affaire est encore loin d'être dans le sac. Car comme Maurice a un accent parisien, Il n'en faut pas plus pour que les Canadiens français le traitent de « maudit Français ». Et comme les Anglais l'entendent parler français, eh bien, eux le prennent pour un French Frog. Et du côté des juifs, on se demande bien d'où il vient, celui-là, qui parle l'arabe mais pas le yiddish ! Un goy ?
 
Il faut voir le jeune homme, alors âgé de dix-huit ans, demander un renseignement à un chauffeur d'autobus, et ne strictement rien comprendre de la réponse : « Faut qu'tu pognes la 4 sus Sherbrooke », lui dit et lui répète l'homme avant d'abdiquer et de s'adresser à Maurice en anglais ! Il faut surtout voir Maurice et sa soif de comprendre avec acharnement ce français que les gens parlent « comme s'ils avaient du chewing-gum (sic) dans les gencives et du papier émeri entre les dents, ce qui les faisait siffler les d et les t ». Il faut le voir chercher l'amitié de tous côtés, d'abord sans distinction, chez les Français et les Anglais, les Ashkénazes et les Séfarades, puis, les filles n'étant certainement pas étrangères à son inclination (« Akkhh, mon Dieu, se disait-il, en rencontrer une, juste l'écouter parler avec cet accent de Louise Forestier ou de Renée Claude »), chez les Québécoises et les Québécois, comme on commençait à le dire à l'époque. On pense que c'est facile de se faire ami avec nous, dont on dit que nous sommes si joviaux, si accueillants, si généreux que nous serions même un des plus gentils publics du monde ? Victor Teboul nous remet gentiment, à plusieurs reprises, à notre place :
 
Combien de générations nous faudra-t-il pour que vous nous reconnaissiez comme des Canadiens ? Combien ? Au moins, les Anglais, ils ne remontent pas jusqu'au Déluge pour vérifier notre attachement au pays. Il était Canadien, mais le pays ne le considérait pas comme l'un des siens. Tout en lui semblait déclarer qu'on ne pouvait être Canadien français que de naissance, comme si cela prenait du sang bleu pour être Québécois. Il y avait là quelque chose d'aristocratique, quelque chose d'inaccessible, d'infranchissable, un vrai mur.
 
Maurice mettra plusieurs années à apprivoiser Montréal, à distinguer les uns des autres les habitants qui la font si multiculturelle, complexe. Et si son pèlerinage dans sa nouvelle vie aboutit à un engagement, politique comme affectif, qui ne laisse aucun doute quant à son intégration au Québec, cela n'aura pas été sans un bon nombre d'embûches, que nous fait ici partager Victor Teboul, avec une habileté de conteur tout empreinte d'humour et de tendresse.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
La Voix sépharade, a pubié une entrevue en mai 2000 :

 

Voir Entrevue

Canadian Jewish News, 2 mars 2000, p.6.
Par Élias Lévy

« Un récit remarquable regorgeant de péripéties cocasses, de personnages attachants à la verve fort colorée, de réflexions judicieuses et peu complaisantes sur une question épineuse qui continue à nous interpeller avec acuité: l'intégration des minorités dans la société québécoise francophone. »
LeCouac, février 2000, p.8.

Par Pierre Vadeboncoeur

« À lire. Instructif. Et captivant, en particulier pour des lecteurs québécois. »
Le Devoir, samedi 18 décembre 1999, p. D.3.

Par Robert Chartrand

« Le récit est plein d'aperçus qui peuvent porter à réflexion. C'est un roman qui suscite «la compréhension, au-delà des différences et des différends. »
La Presse, 5 décembre 1999, p.B.3.

Par Gérald Leblanc

« Un vrai délice ce récit de l'épineuse et fructueuse insertion d'un Juif sépharade dans la communauté franco-québécoise. »
ICI, 25 novembre au 2 décembre 1999.

Par Osée Kamga

« Un livre « audacieux »,« sincère et touchant ». »
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